« Ce
boulot de messie est une plaie ». C’est sur cette punchline surprenante
que débute la quête de Gunnar Kaufman.
Issu de la
classe moyenne afro-américaine, Gunnar, poète dans l’âme et fin basketteur, vit
sa jeunesse de manière insouciante à Santa Monica, seul Noir parmi les Blancs
plutôt aisés qui l’apprécient. Il est néanmoins contraint, suite au divorce de
ses parents, de s’installer dans un ghetto de Los Angeles où règne la loi du
plus fort, entre « Nègres », « Latinos » et « Bridés »
comme ils s’appellent. Survivant tant bien que mal, il devient une figure de l’intelligence
noire américaine, se voulant le fils spirituel de Martin Luther King. Mais,
rapidement déçu, il va se transformer en un nouveau prophète de la communauté
afro-américaine et promouvoir le suicide collectif de son peuple…
Paul
Beatty pose ici la question de l’identité noire aux Etats-Unis. Ses préjugés
raciaux, mais aussi sociaux. Il s’y amuse d’ailleurs en caricaturant son protagoniste.
Passant du jeune rêveur afro au gourou de masse, jonglant par une période
gangsta, Gunnar tente de se trouver une place dans le monde.
Remarqué
chez nous avec Slumberland, Paul
Beatty s’est avant tout fait connaître pour ses talents de slameur, et gagne à
l’occasion d’un concours, un contrat de publication qui lui permettra d’éditer deux
recueils de poésies, malheureusement inédits en France.
Premier
roman de Beatty sorti en 1996 aux Etats-Unis, American Prophet (The Withe
Boy Shuffle dans sa version originale) s’amuse à casser les stéréotypes racistes
de façon originale, à la fois drôle, pleine d’autodérision, et dérangeante.
L’écriture
possède un flow particulier, rythmé et dans une prose très slam, qui mélange poésie et argot de rue d’une manière surprenante
mais maniée.
American Prophet est en somme un excellent
roman coup de poing, qui bouscule nos préjugés tout en étant drôle, poétique et pertinent.
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